L?effet « nocebo ».
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ardi dernier donc, l?agence Moody?s a dégradé la France de AAA à AA1?
Ma première réaction est visible sur ma page Facebook, par la publication du célèbre dessin de la dégradation d?Alfred Dreyfus revisité par mes soins. C?est toujours cette image précise qui me vient à l?esprit lorsque les agences de notation emploient ce terme?
Quatre jours après, je souhaite préciser mon état d?esprit vis-à-vis de ces officines et de ce que j?appellerais « un non-événement ».
Tout d?abord je signalerai la vacuité du travail de ces soi-disant spécialistes. C?est un lieu commun, mais qui est très significatif en soi. Les têtes pensantes de ces agences n?ont absolument rien vu venir de l?éclatement de la bulle financière de 2008 et de la crise qui s?en est suivie. Révélateur?
D?autre part, ces annonces hyper médiatisées tombent complètement à plat pour les spécialistes. En effet, il y a belle lurette que les milieux financiers qui ont leurs propres analystes, connaissent la réalité des choses et ont donc anticipé leurs réactions. Ainsi, mardi, lorsque que Moody?s tel Jupiter foudroyant les pauvres humains, publie la nouvelle note de la France, le marché des capitaux ne frémit même pas. Vers 9 h 30, le rendement des emprunts français à 10 ans évoluait autour de 2,09 %, contre 2,07 % la veille et 1,35 % pour la dette allemande. Quant à la Bourse de Paris, elle perdait 0,14 %. L'euro, lui, avait quasiment regagné le terrain perdu durant la nuit, autour de 1,28 dollar.
Ici aussi, preuve que l?omnipotence de ces agences de notation est complètement surfaite. Surfaite, et inutile de surcroît? Sur ce point, je suis en désaccord avec le journaliste du « Monde », Clément Lacombe qui dans son billet de mardi estimait que ce rappel était « salutaire ».
Cette distribution de mauvais points impressionne surtout les non-spécialistes, d?où un risque de « spirale de défiance ». En fonction de ce que pensent Monsieur Moody, ou Messieurs Standard et Poor, qui aujourd?hui investirait en Italie ou en Espagne sans appréhension, soit directement, soit par une participation financière de type « action » dans les entreprises de ces pays ? A-t-on mesuré l?impact de ces mises au pilori ? Que retient-on aujourd?hui concernant notre pays ? La dégradation, un point c?est tout? Alors que AA1 c?est quand même, d?après eux tout au moins, la deuxième meilleure note? Sait-on également que c?est également la note qui « pend au nez » des USA et du Royaume-Uni ? Si cela n?a pas encore été fait, c?est que les agences précitées sont anglo-saxonnes?
Le seul effet de ces annonces, c?est ce que j?ai appelé en titre, l?effet « nocebo ». L?effet « nocebo » c?est le contraire du « placebo », c?est-à-dire la capacité de guérir uniquement par un effet psychosomatique. Pour le « nocebo », c?est « si on me dit ça, c?est que je suis foutu? », et effectivement la force de l?esprit fait le reste?
Le fait d?instiller dans les esprits que la France est au bord du gouffre, tel l?objet de mon dernier billet concernant « The Economist », ne peut être que profondément toxique.
C?est ce que j?aurais aimé entendre clairement et fortement des hommes politiques aujourd?hui en place, plutôt que le sempiternel péan « c?est pas moi, c?est l?autre » »?
À mon tour. Ma note de l?agence Moody?s : 1/20, pour l?encre et le papier?